Retour à la toute fin des années 80. Après avoir développé Street Fighter, Takashi Nishiyama et Hiroshi Matsumoto quittent Capcom pour intégrer SNK. Matsumoto se voit confier la direction du développement de Riding Hero en 1990 puis il travaille sur le son de Fatal Fury en 1991. Son premier titre majeur en tant que directeur est Art of Fighting. Hiroshi Matsumoto / Finish Hiroshi Art
of Fighting, la série un peu oubliée de la Neo·Geo. Quand on
évoque Ryô Sakazaki et Robert Garcia aux adeptes du jeu de
combat, soit ils sont inconnus au bataillon, soit - au mieux
- il sont cités comme personnages de King of Fighters. Même
si cela est vrai, ce sont avant tout les protagonistes d'une
série, il s'agit donc d'Art of Fighting. Cette saga a
émerveillé beaucoup de joueurs dans la première moitié des
années 90, tant elle faisant efficacement figure de vitrine
technologique pour la Neo·Geo.
Le premier Art of Fighting arrive à une époque où Capcom règne sans partage dans le domaine du jeu de combat avec son jeu fétiche, Street Fighter II. Ce dernier en est alors à sa deuxième déclinaison, Champion Edition. SNK a bien développé Fatal Fury, ce dernier proposant une autre vision, mais rien de bien menaçant. Il y a également eu World Heroes, signé Alpha Denshi, hélas en deçà du mètre-étalon de Capcom. Avec Art of Fighting, on a une nouvelle tentative de la part de SNK. D'ailleurs les développeurs ont puisé en partie leur inspiration en partie chez leur concurrent (pour tout savoir là-dessus, se reporter au dossier "Capcom et SNK, les frères ennemis"). Art of Fighting plonge le joueur dans une
enquête très musclée. Yuri, la sœur de Ryô, a été
enlevée par un mystérieux adepte du karaté Kyôkugenryû,
caché derrière son masque de tengu. Ryô et son ami
Robert parcourent donc la ville de Southtown en
enquêtant à coups de bourre-pif. Hélas, le tableau est loin d'être parfait. Très peu accessible avec sa jouabilité curieuse, sa difficulté relevée et ses deux personnages en Story, il ne parvient pas à supplanter le hit de Capcom dans le cœur de la plupart des joueurs. Son impressionnante réalisation reste néanmoins saluée de façon quasiment unanime par les critiques de l'époque.
Il faut attendre deux ans pour voir arriver la suite des aventures de nos rois du coup de tatane. En 1994 Capcom n'est plus le maître absolu du jeu de combat comme en attestent les Mortal Kombat II, Samurai Shodown et autres Fatal Fury Special. Art of Fighting 2 ne sera donc pas destiné à rivaliser à tout prix avec Street Fighter, ce qui va lui permettre de s'affirmer et de se singulariser davantage. Cette fois le scénario est très basique, même
si on appréciera l'exacte continuité avec le premier
épisode. Yuri est revenue à la maison, Takuma aussi, la
famille Sakazaki est très remontée. Elle va donc se
défouler lors du nouveau tournoi de combat à Southtown,
le "King of Fighters", sponsorisé par le commanditaire
de l'enlèvement de Yuri. Réputé très difficile, Art of Fighting 2 ne
rencontre pas le succès de son contemporain, Super
Street Fighter II Turbo. Il est vrai qu'ils ne jouent
absolument pas dans la même cour. Cela n'empêche pas Art
of Fighting 2 de montrer, une nouvelle fois, les solides
capacités de la Neo·Geo ainsi que la faculté de SNK à
créer un univers cohérent et travaillé.
Le contexte de la sortie d'Art of Fighting 3
est bien différent. Nous sommes début 1996, les stars
du jeu de combat s'appellent Tekken 2, Virtua Fighter
2 ou même Battle Arena Tôshinden. La 2D subit une
terrible ringardisation, malgré quelques jolies
productions signées Capcom, comme Marvel Super Heroes
ou Street Fighter Alpha 2. Cette fois, le but est de
juguler au maximum l'hémorragie des joueurs se
tournant vers les polygones au détriment du bitmap
classique.
Côté scénario, on n'est plus dans la continuité, on se concentre sur Robert Garcia. D'ailleurs, le jeu s'appelle Ryûko no Ken Gaiden, qu'on pourrait traduire par "en dehors de la légende". Lorgnant
clairement vers les jeux en 3D avec ses enchaînements
et ses relevées délicates tout en gardant les bases
des autres opus, Art of Fighting 3 a bien du mal à
convaincre en 1996. Et ce, malgré une réalisation de
grande qualité au regard de sa taille assez modeste
pour un jeu Neo·Geo de cette époque. De plus, du côté
des consoles grand public, la version Neo·Geo CD est
franchement un cran au-dessous de sa consœur à
cartouches avec ses personnages plus petits, et il
n'est d'ailleurs adapté ni sur PlayStation, ni sur
Saturn. D'abord vitrine technologique ultra élitiste en 1992, Art of Fighting a tenté de proposer une alternative à Street Fighter, un peu à la manière d'un Fatal Fury. Trop éloigné des attentes des joueurs, il a tout de même grandement contribué à dévoiler les capacités techniques de la Neo·Geo. Un fait d'armes de prestige hélas non concrétisé dans le domaine de l'arcade, Capcom et son Street Fighter II' y faisant alors figure de références absolues. Le deuxième Art of Fighting a poussé encore plus
loin le concept pour arriver à un résultat franchement
impressionnant pour l'année 1994. Hélas, entre un Super
Street Fighter II Turbo au sommet de son art et un King of
Fighters '94 à venir, il n'a, là encore, guère que
rencontré un succès d'estime. Il reste connu pour sa
difficulté légendaire et sa réalisation généreuse. Enfin le troisième opus, plus souple, moins ardu, doté d'une réalisation de premier ordre, est arrivé trop tard. Le grand public se tournant sans hésitation vers les Tekken et Virtua Fighter du moment. Le public passe à la 3D et le salut de la 2D n'était plus dans l'étonnement technique, devenu trop difficile. Pour la 2D la suite s'est faite avec des jeux s'adaptant au mieux aux joueurs, comme en témoignent les Street Fighter Alpha, les Street Fighter III, les King of Fighters ou encore les Real Bout. Dans ce contexte Art of Fighting n'avait plus vraiment de raison d'être. Art of Fighting 3 est donc le dernier épisode d'une série qui ne survivra partiellement que grâce à King of Fighters. |
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