En
1991 la compagnie Irem lance Gunforce, un run and gun
plutôt bien réalisé même s'il manque un peu de rythme. Il
rencontre assez de succès pour justifier une suite qui
arrive en 1994, Gunforce II. Ce dernier fait un grand pas en avant avec plus d'action, des
véhicules, ainsi qu'en se montrant plus affirmé
graphiquement. Malheureusement le développement du jeu n'est
même pas achevé que les programmeurs apprennent que la
société Irem va fermer ses portes. Aussi quelques membres la quittent pour fonder une
nouvelle compagnie, Nazca Corporation. Rachetée en 1996 par SNK, son premier titre sur
Neo·Geo est Neo Turf Masters, un jeu de golf, et voici le
second, Metal Slug. Ce dernier arrive en arcade le 19 avril
de cette même année, puis sur console Neo·Geo le 24 mai
suivant.
Gunforce
(1991, Irem)
Gunforce II
(1994, Irem)
Neo Turf Masters
(1996, Nazca)
Metal Slug s'inscrivant dans la lignée martiale de Gunforce
II, son intro donne immédiatement le ton : un char, une
mitrailleuse, un tir de canon, le tout se terminant par un
fracassant "Metal Slug!". D'accord, Nazca nous
annonce un grand moment de poésie et de délicatesse.
Malgré
ce qu'on pourrait croire après cette mise en bouche des plus
subtiles, Metal Slug dispose d'une histoire. Au début du XXIème
siècle, c'est la guerre entre deux groupes militaires :
l'Armée régulière et la Rébellion. Cette dernière, dirigée
par le général Donald Morden, a pris l'avantage en 2026.
C'est pour cela que l'Armée régulière a changé de tactique
en privilégiant les opérations ponctuelles, le tout à l'aide
d'un nouveau modèle de char, le Metal Slug. Au bout de deux
ans, il y a assez de chars produits mais les Rebelles
découvrent l'endroit où ils sont entreposés et les volent.
L'Armée régulière a désormais perdu la guerre... ce que se
refusent à admettre quelques-uns, dont le lieutenant Marco
Rossi. Il parvient à convaincre le colonel Tarmicle (Tarma)
Roving de tenter une mission de la dernière chance pour
récupérer les chars ou les détruire.
Un
seul mode de jeu accompagné de quelques options, Metal Slug
fait dans le minimalisme militaire. Mis à part le réglage de
la difficulté et le choix du nombre de vies par crédit,
c'est le désert.
Les
commandes de base sont extrêmement simples. pour tirer, pour sauter et pour lancer une grenade (ou tirer
au canon quand on est dans le char). Enfin la combinaison
permet de sacrifier le char pour faire un maximum de dégâts
aux ennemis.
À
propos des armes, celles-ci sont en nombre. À la base, le
héros a un pistolet pouvant se recharger à volonté, il est
malheureusement peu efficace. Au corps à corps, c'est un
poignard qui sera utilisé. Pour compléter cela, il y a des
grenades très dévastatrices, au nombre de 10 au départ.
Ensuite
vient la célèbre mitrailleuse lourde, très agréable à
utiliser. Oui, cela fait ressortir notre côté bourrin qui ne
demande qu'à s'exprimer... Le lance-flammes permet de faire
brûler vifs vos adversaires mais il est inadapté contre les
blindés. Quant au lance-missiles, ce dernier envoie des
projectiles par série de deux. Enfin, le fusil à pompe est
l'arme la plus puissante mais, revers de la médaille, sa
portée est très courte.
Heavy Machine Gun
Flame Shot
Rocket Launcher
Shot Gun
Pour
vous aider, si vous délivrez des prisonniers de guerre, ces
derniers sortent de leur caleçon (!) des bonus : armes,
munitions, nourriture, pièces d'or, etc.
On
peut disposer d'un char d'assaut (le Metal Slug) qui peut
envoyer des obus et qui possède une mitrailleuse pour
arroser copieusement les soldats ennemis. Ce char peut
encaisser trois impacts avant d'exploser. Il est fortement
conseillé dans ce cas d'évacuer de toute urgence ! On peut
aussi sacrifier son engin en l'envoyant à fond dans le tas
d'ennemis où il finit par exploser. Attention à ne pas
laisser les soldats ennemis s'accrocher au char, ils
arracheront la mitrailleuse ou jetteront une grenade dans
l'habitacle.
Au
travers de six missions plus ou moins longues, on dégomme
des soldats et leurs véhicules sans compter, c'est très
bourrin ! Voici un aperçu des trois premiers niveaux :
À
la fin de chaque mission, on affronte une grosse machine
ennemie qui barre la route. Chacune a son schéma d'attaque
bien précis comme tout boss qui se respecte ; à vous de le
trouver et de vaincre la bête d'acier !
Au
départ Metal Slug est développé dans l'idée de
permettre de jouer uniquement un véhicule, le char,
à la manière de In the Hunt. On y sauve des soldats blancs et ils
deviennent des aides pour le joueur. Ils servent
également probablement de bouclier en prenant un
coup à la place du char. Enfin ils sont capables de
grimper sur la tourelle pour tirer.
D'ailleurs
pour l'anecdote on pourra remarquer que le Metal
Slug ressemble au Bonaparte, un char présent dans le
manga Dominion. Dans ce manga la police patrouille
avec des chars, le Bonaparte étant le mini-tank de
l'héroïne, Leona Ozaki.
Pour
en revenir à cette première version de Metal Slug
présentée en 1995, il est possible d'en trouver des
traces cachées dans le jeu définitif.
Certains
programmeurs intègrent un personnage jouable à pied
pouvant entrer et sortir à volonté du char. Ils
présentent leur travail, ce dernier plaît et l'idée
est retenue sans faire l'unanimité. En effet
d'autres auraient voulu faire quelque chose de plus
différent de Gunforce II. Même si l'ambiance pendant
le développement devient alors plus tendue, le jeu
arrive à son terme sous la forme que l'on connaît
aujourd'hui.
Les
développeurs de chez Irem fournissaient des jeux à la
réalisation de haute volée, trahissant un grand souci du
détail. Metal Slug est-il pour autant le digne héritier de
sa lignée ?...
Au niveau
visuel, on retrouve immédiatement la patte Irem: si c'est
très joli et extrêmement détaillé on pourra trouver les
couleurs un peu sombres et ternes. Les décors regorgent de
petites choses qu'on ne voit pas au premier coup d'œil, ils
se montrent à la fois fouillés et variés.
Ce choix de couleurs un peu austères accentue indéniablement
le côté martial du jeu et lui donne une forte identité.
Côté
animation, pas de souci particulier. Il y a quelques
ralentissements quand cela devient chargé, mais rien de
grave. Metal Slug fourmille de petits détails amusants,
comme par exemple les expressions de terreur des soldats
ennemis quand ils se font surprendre. C'est un véritable
travail d'artiste, on pourrait même dire "d'artisan du
pixel".
Le son est
très bon, avec des explosions et cris de douleur ou de
terreur incessants. Pour l'anecdote on reconnaîtra certains
cris directement repris de Gunforce II.
Quant à la musique, elle convient à merveille au jeu,
renforce son ambiance militaire tout en s'autorisant
quelques envolées jazzy étonnantes.
Concernant la
jouabilité les personnages sont assez réactifs mais un peu
difficiles à manier dans les phases de plates-formes car on
ne peut pas doser la hauteur des sauts. Les armes offrant
une efficacité et un ressenti différent, les situations sont
en définitive plus variées qu'on aurait pu l'imaginer. En ce
qui concerne le char, il se montre très lourdeau mais assez
maniable, compte tenu du fait qu'il peut sauter ou se
baisser.
Les six
missions du jeu se finissent en à peu près une demi-heure,
ce qui est est à la fois court et bien dosé au regard du
rythme imposé au joueur. Fort heureusement, et c'est là
l'immense force de Metal Slug, il s'agit d'un pur jeu
d'arcade qui invite à y revenir souvent, tant l'action est
intense. Cela est d'autant plus vrai à deux, où chaque
joueur peut alors couvrir son partenaire, l'aider en force
de frappe, ou même se sacrifier s'il a davantage de crédits
en stock.
Metal
Slug arrive sur Neo·Geo CD le 5 juillet 1996,
permettant aux joueurs d'accéder à ce titre pour une
somme plus accessible. Nazca en a profité par
ailleurs pour effectuer quelques modifications.
Le
menu d'accueil de ce CD dévoile un écran d'options
bien plus complet que son homologue sur console à
cartouches. Outre le choix du niveau de difficulté
et du nombre de vies, il est possible de changer la
répartition des boutons.
Cette version Neo·Geo CD possède, en plus de sa
grande sœur, deux menus appréciables : Combat School
et Art Gallery. Le mode Combat School se débloque
quand on a fini des missions du mode arcade. Il
s'agit de refaire des niveaux en Time Attack ou en
Survival.
Quant au mode Art
Gallery, il propose de visionner une grande
quantité de dessins qui ont servi de base et
d'ébauches au jeu, ou plus simplement
d'illustrations.
Les
temps de chargement sont très courts : quelques
secondes par mission, pas plus. Toujours dans un
registre parodique, Nazca a remplacé le classique
singe jongleur de la Neo·Geo CD par son équivalent
façon Metal Slug.
Du
côté des pertes, on notera la disparition de
quelques voix comme le "Mission One,
Start!"
et le "Mission Complete". Le
jeu perd également sur le plan visuel quelques
éléments qui agrémentaient le premier plan. Enfin
cette version est censée avoir subi de sévères
coupes au niveau des étapes d'animation mais la
plupart des joueurs ne verront pas de différence à
ce niveau.
Détail assez curieux pour un jeu Neo·Geo CD, les
crédits ne sont pas illimités. Ici on aura droit à
5 crédits et non 4 comme en cartouche. Enfin les
musiques sont strictement identiques à ce que
proposait la version originale, ce qui est loin
d'être un défaut, tant elles sont parfaitement
adaptées au jeu.
Plus
fourni qu'en cartouche, chargeant rapidement mais
accusant quelques pertes minimes, Metal Slug reste
un titre incontournable et ce, autant sur Neo·Geo
que sur Neo·Geo CD.
Bilan
Metal Slug est un superbe jeu bien
défoulant où l'action atteint son paroxysme en
permanence et sans temps mort. Humour et
réalisation de bon niveau répondent présents. Un
petit regret, il est un peu trop court. Là où on
pourrait lui reprocher de manquer de maturité car
ce n'est pas une suite, il bénéficie de l'expérience
acquise avec Gunforce II. Proposer un jeu de
guerre absolument pas sérieux tout en offrant un
maximum d'action n'était pas un pari gagné
d'avance : Mission complete!
Plutôt mésestimé en
1996, les joueurs (et surtout la presse) d'alors
ayant du mal à cerner tout son potentiel
"arcadien" frisant la perfection, la cote d'amour
de ce premier épisode est remontée par la suite.
Magistral dans sa réalisation comme dans son
principe, il a su poser les bases d'une fabuleuse
série. Son prix complètement délirant sur Neo·Geo
l'empêche toutefois de pouvoir figurer parmi les
jeux de tout amateur de Neo·Geo. Heureusement sur
MVS (ce qui permet de se tourner vers la solution
convert) et sur CD dans une moindre mesure, il
reste abordable, sans compter les nombreuses
adaptations, compilations et autres
téléchargements. Voilà un petit bijou à ne pas
manquer, sous peine de court martiale. Rompez !