The King of Fighters '94
 
 

fighting game
©1994, SNK
196 Mbits


 
     

Alors que le petit monde du jeu de combat attend une vraie suite à Fatal Fury 2, SNK fait le choix de créer une nouvelle licence, directement dérivée de deux franchises. Voici donc ce qu'on appelle un crossover, c'est-à-dire une rencontre entre deux séries différentes, à savoir Fatal Fury et Art of Fighting.
Le 25 août 1994 arrive dans les salles de jeux The King of Fighters '94, dont le nom reprend celui du tournoi prenant place lors du premier Fatal Fury. Le but à peine voilé étant, bien entendu, de voler la vedette à Capcom et à son Street Fighter II, désormais bien fatigué, malgré une excellente ultime version.

 

Fatal Fury Special
(1993, SNK)
 
Art of Fighting 2
(1994, SNK)

Super Street Fighter II Turbo
(1994, Capcom)

Un individu du nom de Rugal Bernstein a décidé d'ouvrir sous le pseudonyme de [R] une nouvelle édition du tournoi King of Fighters, autrefois sponsorisé par Geese Howard. La grande nouveauté réside dans le fait que désormais, le tournoi se joue en équipes.

L'intro de The King of Fighters '94 (ou KOF '94) met en opposition Terry et Ryô, les deux répondant à l'invitation du mystérieux [R] qui organise le tournoi.


Deux modes de jeux sont proposés : Team Play et Single Play. Le second n'est qu'un accessoire pour les réfractaires au Team Battle System inauguré par SNK. KOF '94, c'est avant tout un jeu de combat par équipes de 3. On commence par un combat un contre un, puis le perdant est remplacé par un autre membre de l'équipe, et ainsi de suite jusqu'à ce que tous les combattants d'une équipe soient éliminés.
Il reste à déterminer le niveau de difficulté et l'équipe de combattants, à choisir parmi 8.

Une autre particularité de KOF '94 est le nombre impressionnant de combattants qui ne sont pas moins de 24. Pour ne citer que lui, mais puisqu'il est la cible manifeste de SNK, Super Street Fighter II Turbo et ses 17 combattants est bien largué sur ce point. Plus qu'appréciable, donc !
Au programme : 5 combattants issus de Fatal Fury, 5 viennent d'Art of Fighting, et enfin 14 combattants inédits. Inédits... Enfin, pas tout à fait pour être honnête : SNK a fait revenir d'anciennes gloires issues de Pyscho Soldier ou d'Ikari Warriors.


C'est le trio qui constituait tous les personnages jouables du premier Fatal Fury, que de chemin parcouru...



Les karatékas du Kyôkugenryû sont également présents malgré le fait que dix ans séparent les histoires de Fatal Fury et Art of Fighting. Une équipe très équilibrée.



C'est l'équipe du Japon avec des styles variés. Benimaru est adepte des coups de pied secs tandis que Daimon est un judoka bien puissant. Quant à Kyô, il a le pouvoir de maîtriser les flammes.



Ces militaires sont en mission mais surtout Heidern cherche à se venger de celui qui a assassiné sa famille. On notera que Ralf et Clark viennent du jeu Ikari Warriors.



On retrouve dans cette équipe Kensu et Athena des jeux Psycho Soldier et Athena.


Une pure caricature d'Américains basiques. Bourrins, imposants et très puissants. Un basketteur, un boxeur et un joueur de football (américain, cela va de soi).


Kim a entrepris de prendre deux marginaux dans son équipe et de les remettre dans le droit chemin. Souhaitons-lui bien du courage. On retiendra la puissance phénoménale de Chang et la vivacité extrême de Choi, sorte de Freddy Krueger frénétique.


Recevant également une invitation, Yuri veut participer au KOF mais son frère et son père refusent de la prendre afin qu'elle n'y prenne pas part. Qu'à cela ne tienne, elle demande à King et à Mai (mise à l'écart par Andy) de former une équipe.

Cette pléthore de combattants qui s'offre au joueur se répartit donc en huit équipes, chacune disposant de son propre stage. Contrairement au premier Fatal Fury ou aux deux Art of Fighting qui se déroulaient dans une seule et même ville, SNK a ici opté pour la formule plus traditionnelle du petit tour du monde, chère à Capcom et ses nombreuses itérations de Street Fighter II.

Le maniement de base reprend dans les grandes lignes celui de Fatal Fury Special.
: coup de poing rapide
: coup de pied rapide
: coup de poing fort / provocation
: coup de pied fort
Il y a également le backdash ainsi que le dash . Attention, le backdash de KOF '94 n'offre pas la même invincibilité que son homologue de Fatal Fury Special.

Justement, question invicibilité la combinaison est une esquive pendant laquelle on est totalement invulnérable tandis que est un coup très fort qui fait tomber l'adversaire. On notera que est réalisable pendant un saut, bien que l'animation du coup devienne strictement la même que celle d'un coup de pied puissant. Enfin permet de remplir la Power Gauge.

La combinaison permet également d'effectuer une Assist Attack. Il faut jouer en équipe, être étourdi ou saisi et qu'au moins un coéquipier soit visible et non éliminé. Il interviendra pour donner un coup (sans infliger de dégâts), le temps de se dégager ou de retrouver ses esprits.

Chang étrangle Benimaru...
... mais Goro vient à sa rescousse.

Une fois la Power Gauge remplie, le personnage se met à clignoter et il devient plus puissant. C'est également l'occasion de tenter une Lethal Attack ( ou Desperation Move). Tant qu'elle n'est pas remplie, l'adversaire peut tenter de la vider avec une provocation, comme dans Art of Fighting. La provocation ne peut se faire que de loin, comme dans Fatal Fury Special. Décidément, KOF '94 est bien le fils spirituel de ces deux jeux !

Outre les Lethal Attacks, les plus classiques Super Attacks sont évidemment de la partie. Comme dans la série Fatal Fury, on remarquera que les Lethal Attacks sont également réalisables quand la barre de santé devient rouge. Les habitués d'Art of Fighting 2 et de Fatal Fury Special retrouveront leurs marques avec un bon nombre de personnages.

Hishô Ken
+ ou
Shô Ryû Dan
+ ou
Cho Reppa Dan
(2 sec) +



En effet il y a une filiation entre la société Irem, Last Resort et King of Fighters '94. Tout commence en 1990 avec le départ d'Irem de Mitsuo Kodama pour intégrer SNK. Il travaille d'abord à partir de la même année sur le design de Ghost Pilots puis en 1992 sur Last Resort, rejoint par Yoshio Shimizu.

Et c'est vrai que dès Last Resort on retrouve un visuel au grain très Irem, avec utilisation massive de ces pixels colorés différemment et alternés afin de simuler un dégradé.

Mitsuo Kodama se retrouve ensuite directeur artistique sur King of Fighters '94, et là encore on a droit effectivement à ce style visuel.

Encore plus fort, toujours dans KOF '94 on peut voir des inspirations de Last Resort, comme par exemple les flammes du deuxième boss de Last Resort qui sont recyclées pour la Lethal Attack de Chin.

Ou encore le stage Japan, reprenant pour son fond les immeubles du premier niveau de Last Resort, lui-même inspiré par Akira. D'ailleurs, ce fond est exactement un plan d'Akira.

En jouant à KOF '94 on a donc un petit goût de Last Resort, et même d'Irem dans une certaine mesure.

À la fois héritier des Fatal Fury et Art of Fighting, proposant pas mal de nouveautés et se montrant généreux en personnages, The King of Fighters '94 s'annonce effectivement comme une arme anti-Capcom redoutable. A-t-il pour autant une réalisation en rapport avec ses prétentions ?



En ne proposant que neuf décors de fond, KOF '94 est de prime abord assez pingre dans ce domaine. Qui plus est ces derniers ont des couleurs moins éclatantes que les productions précédentes. Cependant, il faut avouer qu'ils sont magnifiques, très travaillés dans les moindres détails, avec de nombreux caméos.
Les personnages sont traités avec le même style graphique : les contours sont estompés et les silhouettes plutôt fines en comparaison de ce à quoi SNK nous avait habitués.
Ce style moins chatoyant avec des personnages pouvant paraître un brin maigrichons pourra sembler austère, tant il pourra dérouter les habitués de Fatal Fury et Art of Fighting.


C'est assez rapide, mais les personnages sont un poil raides si on fait une comparaison avec l'étonnant Darkstalkers de Capcom, sorti un peu plus d'un mois auparavant. L'ensemble reste tout de même plus que convenable au regard de la concurrence.
Les stages sont très animés, au point de parfois verser dans la caricature avec des badauds gesticulant à outrance.


Certaines digitalisations vocales sont empruntées à Fatal Fury Special et à Art of Fighting 2 : elles sont excellentes, par conséquent ! Du côté des bruitages, ça claque, c'est sec, cela ne manque pas d'impact.
Les musiques, sans être aussi notables que celles d'un Samurai Shodown, d'un Fatal Fury Special ou d'un Art of Fighting 2, se montrent tout de même très réussies.


Comme cela a été évoqué, les coups et mouvements proviennent aussi de ces deux jeux pour 10 personnages. Par exemple, Robert possède une sacrée quantité de Super Attacks (le Haoh Shoko Ken devient même une Super Attack de base) tandis que les personnages de Fatal Fury peuvent avancer accroupis.
Pour les nouveaux, tout reste à découvrir. Tout est bien pensé, aucun souci de ce côté : les enchaînements sont plutôt techniques et rigoureux, sans toutefois verser dans un excès qui rendrait les duels trop décalés des possibilités du jeu. Justement à propos des enchaînements, ils sont dévastateurs et, surtout, étourdissent très rapidement... ce qui donne l'occasion à l'assaillant d'en remettre une très large deuxième couche.
KOF '94 demande une grande rigueur à ce chapitre : un petit temps d'adaptation sera nécessaire pour s'y sentir plus à l'aise, tant l'exécution des coups exige de la précision... mais cela en vaut la peine.


Voilà un jeu qui a une très bonne durée de vie, ne serait-ce que du fait du grand nombre de personnages. Les plus frileux au Team Battle System pourront entrer par la petite porte du jeu à 1 contre 1.
Quant aux duels, essence même de ce titre, ils se succèderont sans qu'on ne voit le temps passer.
Les formations sont malheureusement imposées, il faut donc composer avec ce qui est proposé.




Il manque certains détails pour cette version Neo·Geo CD, comme par exemple les voix "perfect" ainsi que celle du personnage lors d'une charge, ou l'arbitre devenu silencieux dans le stage USA. Cela étant, dans l'ensemble c'est très proche de l'original.
Cette version Neo·Geo CD profite de son support avec des musiques de fond qui ont droit à de bien jolies réorchestrations (il y a même la chanson d'Athena pour l'équipe Psycho Soldier).

Passons au point qui peut fâcher : les temps de chargement. Eh bien ces derniers sont certes un peu longs, mais en contrepartie la console charge les six combattants d'un seul coup, ce qui évite les coupures entre chaque manche. Curieusement si on joue en mode Single Play la console charge tout de même les six combattants et là, niveau rentabilité du temps d'attente, on pourra repasser.

Même si KOF '94 sur Neo·Geo CD est globalement similaire à son homologue en cartouche, les plus tatillons pourront y trouver des différences. Les chargements bien pensés en mode Team permettent quelques parties à deux sans sentiment de coupure, et les musiques instrumentales utilisent bien le CD. Bien entendu pour du versus intense, les versions cartouche restent tout de même les plus indiquées.


 
Bilan
 
 

The King of Fighters '94 apporte une bonne dose de sang neuf aux jeux de combat en versus et confirme la maîtrise de SNK dans ce domaine... c'est impressionnant ! Bien qu'extrêmement abouti et ultime, Super Street Fighter II Turbo est définitivement relégué au rang de glorieuse antiquité.
Bien entendu, cette profusion de nouveauté implique des soucis de jeunesse, comme les équipes figées, le boss unique, ou encore la jouabilité plutôt exigeante. Peut-être que cela l'empêche de surpasser le monument de Capcom. Probablement. Mais pas de quoi empêcher de savourer sans modération cette nouvelle franchise.


KOF '94 est le premier épisode d'une saga au long cours ayant rencontré un immense succès... et c'est peu de le dire ! Évidemment, cet opus original peut sembler très limité sur de nombreux points en comparaison des épisodes plus récents... et il l'est ! Cela étant, KOF '94 reste généreux par son ambiance, sa bande-son percutante et son style résolument à l'ancienne.

Tarma

 
     

   




 

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