Dans le monde du run and gun, s'il est une série qui s'est particulièrement illustrée de par sa grande qualité, c'est bien Metal Slug. Chaque épisode a apporté ses nouveautés, même le X, ce dernier ne visant pas seulement à éliminer les ralentissements du 2. Cela s'est fini en apothéose en 2000 avec un Metal Slug 3 certes long sur la fin, mais rassemblant tout ce qui devait l'être dans ce chapitre ultime. La compagnie est rachetée par Aruze puis fait faillite en 2001, les licences étant récupérées par Playmore. Cette dernière confie alors le développement d'un nouvel opus à Mega Enterprise, un studio de développement coréen. Ainsi arrive Metal Slug 4 en mars 2002, écrasé par la lourde tâche de succéder à son aîné.

De son côté, la confidentielle compagnie International Games System (ou IGS) développe des jeux sur son PolyGame Master (ou PGM). Ce système est très proche du MVS, mais en plus récent et plus puissant. L'éditeur va lancer en juin 2002 son premier run and gun, Demon Front. À sa sortie, les joueurs pensent immanquablement à la série initiée par Nazca en 1996.

On a souvent tendance à comparer Demon Front au plus complet des Metal Slug, à savoir Metal Slug 3. En effet ce dernier est considéré comme l'aboutissement de la série et donc de taille à faire face à un jeu tournant sur l'impressionnant PGM. Le rival direct et contemporain de Demon Front demeure néanmoins Metal Slug 4.
Metal Slug contre Demon Front, Corée du Sud contre Taiwan, Neo·Geo contre PGM, on fait le plein de munitions et c'est parti. Mission 1, Start!

 

Metal Slug, c'est visuellement le pixel art poussé à l'extrême. Chaque tableau est pensé avec soin, sans répétition ni monotonie, le tout avec une qualité toujours à son maximum. Enfin, cela était valable jusqu'à Metal Slug 3. Ici, c'est plutôt le "recyclage art" qui règne en maître. Mega Enterprise s'est contenté d'emprunter des bouts de décors aux épisodes précédents et de les assembler au hasard, sans ligne directrice claire. Bien sûr, le pixel art reste présent, mais la qualité est nettement un cran au-dessous de ce dont on avait pris l'habitude. Il y a bien quelques nouveaux tableaux, mais ils se révèlent peu inspirés et pas toujours du meilleur goût. Quant aux nouveaux personnages, Nadia et Trevor, ils ont un look correct mais ne peuvent faire oublier Eri et Tarma, seulement présents pour les scènes de transition. Originalité quasi-nulle, couleurs ternes, assemblages discutables, ce Metal Slug 4 déçoit.
À ce chapitre, Demon Front fait mal à Metal Slug 4. Très mal. Non seulement le système PGM permet une résolution nettement supérieure à celle du MVS, mais en plus les programmeurs se sont surpassés. Finesse du trait, couleurs éclatantes, détails en pagaille, tout est magnifique. On pourra regretter un certain manque de charisme des personnages (surtout Maya la gueunon et Dr.J), mais c'est tout.
Demon Front consolera sans aucun souci les amateurs de belle 2D, déçus par Metal Slug 4. Plus que les consoler, il les enchantera. Le jeu d'IGS gagne nettement à ce chapitre face à un Metal Slug 4 tout juste correct.

Demon Front


Ce boss est très imposant et, paradoxalement, peu impressionnant.
(Metal Slug 4)

Cette charmante grosse bestiole porte le doux nom de Evil Eyes.
(Demon Front)


Les couleurs de Metal Slug 3 ne sont plus qu'un lointain souvenir.
(Metal Slug 4)

Les bâtiments ennemis virent aussi à l'orange quand ils essuient des tirs.
(Demon Front)

 

Depuis Metal Slug 2, chaque nouvel épisode de cette série est attendu au tournant concernant les ralentissements. Bonne nouvelle, Cet épisode 4 n'en a que très peu. Pour le reste, tout est bien décomposé, bien qu'on voit hélas la différence entre les anciens ennemis et les nouveaux, moins travaillés. On pourra aussi regretter que Mega Enterprise, quitte à faire du recyclage, n'ait pas puisé dans les animations à l'humour plus poussé du premier Metal Slug. Il reste des effets réussis comme les explosions et autres gerbes de vomi zombie... tout étant du déjà-vu. Bref, là encore, de la réutilisation massive sans créativité pour le Metal Slug en lice.
De son côté, Demon Front est absolument impeccable. Pas de ralentissements, animations soignées, effets de lumière discrets mais toujours appropriés, explosions réussies (et différentes de Metal Slug, chose pas si évidente que cela)... Le jeu d'IGS ne commet pas de faux pas de ce côté-là en se montrant tout à fait à la hauteur de ce qu'on attend d'un jeu en 2D haut de gamme.
Là encore, Metal Slug 4 trébuche là où Demon Front s'en sort grâce à un travail sérieux et appliqué.

Demon Front


Peu de ralentissements s'invitent dans cet épisode.
(Metal Slug 4)

Dans cette mine désaffectée, le Pet de feu Level 9 pète le feu !
(Demon Front)


Les explosions et autres effets enflammés sont de premier ordre.
(Metal Slug 4)

Joli effet quand on combine les Pets des deux joueurs.
(Demon Front)

 

Ouf, enfin un chapitre où Metal Slug 4 se montre innovant. Enfin, à moitié, n'exagérons pas. Les bruitages et autres digitalisations vocales sont empruntées à Metal Slug X et 3. C'est donc logiquement de très bonne qualité et suffisamment varié. Mais revenons à la nouveauté, les musiques. Eh bien, d'abord elles se montrent hélas peu nombreuses, une par niveau, auxquelles il faut ajouter les thèmes des boss. La qualité est au rendez-vous, mais l'inspiration est très variable et, franchement, cela n'a pas du tout le souffle des opus précédents. L'ensemble reste donc de qualité, mais peu inspiré. Dommage, il y avait moyen de se distinguer.
Demon Front ne dispose pas de mélodies mémorables. Elles soutiennent bien l'action, sont bien adaptées aux différents décors mais ne restent pas spécialement en tête, une fois la partie terminée. Les bruitages sont d'un bon niveau : variés et de qualité, que demander de plus ?
Nos deux rivaux font ici à peu près jeu égal, aucun ne parvenant à se distinguer particulièrement.



Égalité


Les bruitages sont toujours aussi percutants.
(Metal Slug 4)

Heavy Machine Gun! Ah non, pas dans ce jeu !
(Demon Front)


Les mélodies sont ici assez peu nombreuses et d'inspiration variable.
(Metal Slug 4)

Musiques discrètes mais très honnêtes du côté du PGM.
(Demon Front)

 

Metal Slug est une valeur sûre du run and gun et, heureusement, Metal Slug 4 ne saccage pas cet héritage. La jouabilité se montre solide avec, cerise sur la gâteau, la Metal Slug Attack désormais associée au bouton . On ne sacrifiera plus son véhicule par erreur. Les personnages répondent bien mais aucune différence entre eux n'est à noter, malgré l'arrivée de Nadia et de Trevor. Mega Enterprise manque - là encore - une occasion de creuser une des rares innovations de son jeu. Côté nouveautés, on appréciera le système de médailles servant à gonfler son score, les véhicules à voler aux ennemis (idée déjà présente de façon discrète dans l'épisode 3, il est vrai) ainsi que la possibilité d'être transformé en singe, en plus des habituels zombies et momies. Quant aux armes, elles sont assez nombreuses mais n'ont plus qu'un seul niveau de puissance.
Avec Demon Front, aucun souci de maniabilité n'est à relever. La jouabilité est cependant assez différente de celle de Metal Slug 4. Ici, point de véhicule à manier, ni même de grenade à balancer. Tout est basé sur le Pet (non, ce n'est pas sale), cet animal de compagnie différent selon le personnage choisi. Chacun symbolise un élément et a ses propres attaques. Il est possible de le faire évoluer, de lui faire faire un tir concentré ainsi que de l'utiliser pour générer un bouclier. Ajoutons à cela la possibilité de planer ainsi que de combiner les tirs concentrés pour une attaque spéciale (qui dépend de la combinaison des Pets joués), quand on joue à deux, et on obtient un titre particulièrement agréable à manier.
On pourra regretter que les armes - dont on peut augmenter la puissance - soient moins nombreuses que dans Metal Slug 4 (5 contre 9) ou que la mitraillette ne permette pas d'arroser dans toutes les directions, mais ce serait pinailler.
À la fois original, assez complet, bien conçu et surtout très maniable, Demon Front remporte de peu la manche face à un solide Metal Slug 4 qui pêche légèrement par son classicisme. Quand on aime le run and gun (et donc qu'on connaît Metal Slug 3) et qu'on découvre le jeu de Mega Enterprise, on se dit "Pas mal, mais c'est tout ?". Pour le titre d'IGS, on est surpris, et en bien.

Demon Front


La séquence How to Play explique l'utilisation du bouton .
(Metal Slug 4)

Les commandes rappellent celles des Metal Slug.
(Demon Front)


Nadia sait parfaitement se servir de ce chariot de manutention.
(Metal Slug 4)

Petit passage plates-formes avec ces morceaux de décor qui s'écroulent.
(Demon Front)

 

Cet opus de la saga Metal Slug offre six missions, relativement longues. Pas évident à terminer, il donnera pas mal de fil à retordre aux joueurs non hardcore. Mais après tout, cela reste un jeu conçu pour faire débourser de l'argent, surtout aux joueurs peu investis. On regrettera par contre la difficulté, assez mal dosée par moments. Certains passages paraissent impossibles à surmonter sans perdre une vie. Cela n'est certes pas le cas, mais seuls les plus persévérants pourront y parvenir. L'épisode précédent avait beau être difficile sur la fin, long, tout ce qu'on voudra, sa difficulté était plus progressive. Une fois fini, il faut avouer que ce Metal Slug 4 donne moins envie d'y revenir que ses prédécesseurs, malgré l'activation d'une Art Gallery des plus modestes. Il y a bien quelques passages alternatifs, hélas peu nombreux.
Finir Demon Front ne sera pas chose aisée mais la difficulté se montre bien dosée, avec une bonne montée en puissance des pièges à éviter. On notera la barre de vie des différents boss, franchement longue à faire descendre. Là où IGS a fait fort, c'est qu'il y a plusieurs raisons d'y revenir, même quand on l'a terminé. En premier lieu, il n'y a pas un boss de fin, mais plusieurs, chacun dépendant du Pet joué. Voilà une bonne raison de finir le jeu avec chaque personnage. Ensuite, pour avoir la vraie fin de Demon Front, il faut soit le finir en moins d'une demi-heure, soit récolter les artéfacts de tous les niveaux, au moyen d'une clef ouvrant une salle cachée. Cette dernière possibilité n'est pas évidente, mais elle s'avère très prenante. N'oublions pas quelques passages cachés permettant de finir différemment certains tableaux.
Pas nécessairement plus long, ni plus difficile que Metal Slug 4, Demon Front s'illustre ici de façon magistrale en donnant envie d'y revenir régulièrement pour en découvrir tous les secrets.

Demon Front


Eri et Tarma ont disparu au profit de nouveaux venus.
(Metal Slug 4)

4 personnages au programme également chez IGS.
(Demon Front)


Quelques passages alternatifs agrémentent ce cinquième épisode.
(Metal Slug 4)

Le Select Stage permet d'abord de découvrir trois niveaux.
(Demon Front)

 

 
Bilan
 
 

Metal Slug, star incontestée du run and gun ? Eh bien grâce à IGS et son Demon Front, la réponse est désormais non. Non seulement son jeu conteste la couronne de Metal Slug, mais en plus, il la lui prend ! Très joli, bien maniable, assez original et doté d'une bonne durée de vie, il ne laisse que peu d'air à un Metal Slug 4 asphyxié par le manque d'ambition de ses développeurs.
Bien sûr, ce n'est pas un mauvais jeu, il est même pas mal du tout et mérite absolument d'être joué, pour qui aime le run and gun. Malheureusement, d'une part il a vraiment du mal à se montrer aussi enthousiasmant que ses glorieux aînés, mais en plus, il ne fait pas non plus longtemps le poids face à un Demon Front étonnant de finition pour un jeu si confidentiel.
Des félicitations à IGS et un "peut mieux faire mais ne s'applique pas" à Mega Enterprise.

Tarma






 
     

   




 

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